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Porc
Fin de la castration à vif : comment la filière se prépare à l’échéance ?

Au 1er janvier 2022, les éleveurs ne pourront plus pratiquer la castration des porcelets, sauf s’ils appliquent un protocole d’anesthésie. L’amont craint un manque de débouchés pour le mâle entier et pour l’intégration des viandes odorantes.

Le plus inquiétant pour les éleveurs pour l’instant, est que la prise en charge du surcoût lié à l’anesthésie reste floue.
© AA

Depuis un an, la perspective de l’interdiction de la castration à vif des porcelets crée de vives discussions entre OP, vétérinaires et abatteurs. La volonté du gouvernement, qui fait « du bien être animal en élevage une priorité », s’est concrétisée par l’arrêté de février 2020, qui interdit la castration à vif à partir du 1er janvier 2022. L’opération devra désormais être pratiquée en suivant un protocole de prise en charge de la douleur. à la veille de l’entrée en vigueur de la mesure, de nombreuses questions restent en suspens pour les groupements de producteurs, notamment celle de la prise en charge du surcoût lié à l’anesthésie.


Trouver les débouchés
En France, pour le moment, seule la coopérative Cooperl (lire encadré) a fait le choix d’arrêter la castration - 80 % de ses éleveurs produisent des mâles entiers en 2021 -, en équipant ses abattoirs de nez humains. « La production de mâles entiers demande trois choses : la mise en place d’un cahier des charges de production impliquant notamment une génétique et une alimentation spécifique, le recours aux nez humains, et qu’il existe un débouché pour les carcasses odorantes ; si leur fréquence est de moins de 2 %, elles pourront être utilisées », estime Patrick Chevillon, expert en qualité des viandes de porcs non castrés à l’Ifip.
Le destin des éleveurs est entre les mains de l’aval. S’il a l’avantage d’offrir un meilleur indice de consommation, le mâle entier, plus maigre, ne répond pas aux attentes de tous les clients des abattoirs. « Certains salaisonniers ont besoin de carcasses grasses pour la fabrication de jambons secs », illustre Patrick Chevillon. Le mâle entier s’adapte bien, en revanche, au marché du cuit. Reste à pouvoir utiliser les viandes odorantes, exclues pour la fabrication de produits crus, mais qui peuvent être intégrées aux préparations cuites. Certains industriels sont déjà habitués à cette pratique, mais beaucoup ont du mal à sauter le pas. Pour l’instant, les OP marchent donc sur des œufs.


Des protocoles lourds
Tous les éleveurs qui continueront à castrer les mâles devront apprivoiser les protocoles d’anesthésie fournis par le centre de ressources CastraBEA de l’Ifip. Deux options sont proposées : la première prévoit une injection de lidocaïne dans chaque testicule, l’autre l’apposition du gel tri-soflen, via une canule, après incision du scrotum de l’animal. « Ces protocoles sont très lourds pour l’éleveur, multipliant par 4 ou 5 le temps de la castration », dénonce Antoine Forêt, président du groupement Bio Direct.
Reste l’alternative de l’immuno-castration, qui consiste à bloquer le développement des testicules par l’injection d’une protéine. Une technique qui pourrait faire des émules au vu de la complexité des protocoles d’anesthésie imposés, mais dont l’efficacité discutée ne dispenserait pas de devoir détecter les carcasses odorantes à l’abattoir.


Surcoûts de production
Le plus inquiétant pour les éleveurs pour l’instant, est que la prise en charge du surcoût lié à l’anesthésie reste floue. Le décret du 29 octobre 2021 visant à protéger la rémunération des agriculteurs impose la conclusion d’un contrat écrit pour la vente de porcs charcutiers castrés nés à partir du 1er janvier 2022. Chez Agrial, le service juridique travaille à l’établissement de ces contrats en discussion avec sa branche Viande. « Nous aimerions que la négociation des prix se fasse entre l’AOP porc grand Ouest et les abattoirs, pour la définition d’une grille de plus-value commune », indique Jean-Luc Chéreau président de l’AOP porcs d’Agrial. Le surcoût éleveur lié à l’arrêt de la castration à vif peut être estimé via l’outil SIM’Alter, sur le site de l’ifip.
Fanny Collard

 

Chez Terrena, encore 65 % de mâles castrés

« A Terrena, à ce jour, 25 % des mâles sont entiers », explique Thierry Lambert, président du Groupement porcs de Terrena et Porvéo. Terrena a en effet établi des cahiers des charges avec certains grands distributeurs qui acceptent le mâle entier. « Et cela se passe bien, nous n’avons pas de retours négatifs quant à la qualité ». Ces mâles sont abattus au sein de l’abattoir du groupe Terrena, Holvia Porc, à Laval.
 

Chez Cooperl, 80 % des porcs sont entiers

Cooperl a initié les tous premiers essais sur l’immuno-castration en 2008, avec Uniporc et Pfizer. Le problème est que cette solution ne se suffisait pas à elle-même : il fallait doubler avec des contrôles de carcasses odorantes en abattoir. Quitte à devoir contrôler les carcasses (par des nez humains), la solution retenue par Cooperl a donc été la voie du mâle entier. Des essais avec
40 éleveurs pilotes ont été mis en place en 2009. Il s’agissait de travailler sur l’alimentation (notamment la teneur en tryptophane), la génétique (développement du verrat INO pour “inodorant”), mais aussi les pratiques d’élevage. Il fallait aussi lever les a priori des éleveurs liés aux comportements des mâles entiers : allait-il falloir les séparer des femelles pour éviter les chevauchements ? Au final, ces doutes ont été levés, et, après 4 ans de recherche et développement et
2 millions d’euros investis, le lancement commercial du mâle entier (c’est-à-dire l’ouverture à l’ensemble des éleveurs Cooperl) s’est fait en 2013. En 2021, 80% des éleveurs Cooperl sont en mâle entier. Ceux en Label rouge doivent rester en castré (le cahier des charges l’impose, mais une ouverture est attendue prochainement au niveau du CPC Label Rouge pour permettre la castration). En bio, la moitié des éleveurs Cooperl pratique déjà le mâle entier (proposé depuis 3 ans).

 

 

 

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