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Influenza aviaire
« Nous militons depuis 2015 pour un plan prophylactique de vaccination des animaux »

Interview de Frédéric Grimaud, président de Grimaud Frères Sélection, à Sèvremoine (49).

À date, pouvez-vous nous donner un aperçu de la situation à laquelle vous faites face dans les élevages et dans les couvoirs ?
L’impact de la crise d’Influenza aviaire que nous vivons est considérable, notamment parce qu’il touche le maillon accouvage, très présent dans notre région. On est sur des abattages massifs, en Vendée où le dépeuplement est en cours. On parle de centaines de milliers d’animaux. C’est évidemment un drame pour les élevages en production de chair, mais l’effet est encore plus grand sur les élevages repro qui sont sur des cycles de près d’un an et demi, et dont les abattages vont générer un dérèglement spectaculaire dans les filières palmipèdes. Alors même que le sud-ouest de la France allait entrer en phase de repeuplement, on va malheureusement traîner un impact de cette crise au moins jusqu’à fin 2023. Et au-delà des élevages, c’est l’ensemble de la chaîne qui est impactée. Nous sommes en train de mettre en place des mesures de chômage technique en Vendée où nous avons dû mettre en veille un couvoir. Jusqu’ici on arrive encore à faire sortir des canetons depuis nos outils du Maine-et-Loire et de Mayenne, mais on a réduit drastiquement nos capacités et la situation est précaire. Notre priorité en ce moment est d’assurer la continuité de nos entreprises, aussi bien des élevages que de nos outils industriels. Il faut vite que les compensations soient déclenchées, au risque de ne pas pouvoir repartir. On sort déjà de deux années de Covid qui avaient fragilisé nos productions. On vient de prendre, comme tout le monde, les effets de la crise ukrainienne. Notre flux de production était déjà en tension, mais là il va se désorganiser brutalement. Je peux vous dire qu’il va falloir être costaud pour arriver à faire tenir les troupes et relancer l’activité.

L’Anses est en train de répertorier les causes possibles à l’origine de cette pandémie. Pour vous quelles sont-elles ?
On évoque des flux migratoires d’oiseaux arrivant du sud. C’est très certainement le cas, mais je dirais que peu importe. La catastrophe était annoncée depuis des années. Malheureusement pour nous, ce n’est pas une surprise.  Si on fait un peu d’histoire, nous avions connu une première alerte sérieuse d’Influenza aviaire en 2006 en Europe, puis la situation s’était normalisée avant de revenir en boomerang en novembre 2015. Et là, ça n’était plus du tout anecdotique. On n’était plus sur un épiphénomène mais clairement sur un phénomène systémique. Et aujourd’hui, on voit bien que les mesures de biosécurité dans les élevages, si elles sont indispensables, ne sont malheureusement pas suffisantes pour se protéger des oiseaux du ciel. On le constate même avec des bâtiments à air filtré, et sur-pressés. C’est la raison pour laquelle nous militons depuis 2015 pour un plan prophylactique de vaccination des animaux. Nous n’avons pas vraiment été entendus jusqu’ici, mais les lignes sont en train de bouger, et il est grand temps !

Qu’est-ce qui, jusqu’ici, expliquait le blocage sur cette question de la vaccination ?
Certains mettaient en avant un premier nœud réglementaire qui consistait à dire qu’à partir du moment où l’on vaccine, il ne serait plus possible d’identifier les anticorps d’origine vaccinale des anticorps liés à une contamination sauvage, et que de ce fait, la France prendrait le risque de perdre son statut indemne d’Influenza aviaire. Or c’est faux. On sait parfaitement reconnaître les anticorps issus de la vaccination. Le deuxième nœud était que certains craignaient jusqu’ici que la France s’isole sur le plan mondial en étant les premiers à partir sur la vaccination. Or le code de l’OIE qui régit les échanges commerciaux n’interdit en aucun cas les vaccins. Par ailleurs je suis persuadé que si la France était partie plus tôt, les autres grands pays exportateurs comme l’Allemagne, les Pays-Bas ou les États-Unis, nous auraient emboîté le pas. Il faut donc les encourager à nous rejoindre dans cette solution vaccinale.  

Votre groupe est producteur de vaccins, avec votre filiale Filavie. N’avez-vous pas peur qu’on vous accuse d’être juge et partie ?
Honnêtement, vu l’état de la filière, ce n’est pas ça qui m’inquiète. Oui on serait en capacité de développer un vaccin si collectivement il était décidé d’aller sur cette voie. Les professionnels semblent s’être saisis de cette possibilité. C’est tant mieux. Des essais vont être initiés, mais attention, dans le meilleur des cas, nous ne pourrions nous projeter sur un vaccin avant au mieux deux ans ! Il peut se passer des choses d’ici là. De toutes façons, et les éleveurs les plus anciens s’en souviendront peut-être, je fais le parallèle avec la fièvre aphteuse dans les années 70, où il a fallu presque 10 ans pour faire accepter le principe d’un programme de prophylaxie par la vaccination. Vous voyez qu’entre 2015 et une solution vaccinale qui arriverait potentiellement en 2024, on est sur le même pas de temps. Malheureusement on a perdu du temps. Aujourd’hui on est dans la tempête. Mais il est trop tard pour avoir des regrets, il faut avancer !
 

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